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172 CORRESPONDANCE. Vous rougiriez, si vous connaissiez ·Versailles, du portrait que vous en faites; tout ce qui est oblige d’y rester, en pleure. Jeu perpétuel, pas un mot de bon sens; et ce sont les plus pauvres especes du royaume, connues pour telles, qui y dominent, ou du moins qui y tiennent le dé. Quelle idée d’aller cherclrer le séjour du vice et de la degradation totale de tous sentiments, pour y paraltre vertueux avec plus d`éclatl Ghacun cherclre son semblable : le plus honnete homme de ce pays—la , M. de Mortemart, a tout quitté. Je n'aurais garde de conseiller ce parti a mon ami, s’il y était attaché par les memes liens; mais encore moins lui di- rais-je de s’en rapprocher, si rien ne l’y appelait. Vous me poursuivez trop, pour que je continue ma diversion; je n’ai sur cela qu’un mot a vous dire: vous savez plus que personne que j’ai connu la faculté de penser; elle n’est faite que pour s’appliquer sur les objets de bonlreur qui sont a notre portée, et nous former pour eux, ou les rapprocher de nous. Pourquoi laisser égarer nos désirs? Personne ne peut tout ce qu’il voudrait; la nature ou la Providence ont pris soin de nous laisser sur cela un ver, qui se charge du rnalheur de tous les lrommes, si la raison ne le tue. Le plus puissanta les désirs les plus fous, et, en meme temps, les plus impérieux; je ne connais a cela qu’un re- · mede, c`est de ne vouloir a peu pres que ce que l’on peut; vous serez alors au niveau des autres pour la situation, et aurez un grand avantage, quant a Fame et A l’esprit, qui sont les grands mobiles de notre bonheur, l et que la culture nous rend propres. Pour le reste, peut-etre en savez- vous plus que moi; je dis ce que je pense bon, et que je voudrais rendre propre a mes amis, car quel autre motif pourrait me faire parler? Saint- Bernard voulait etre le seul théologien de son temps. M. de Saint-Georges pretend qu’il est devenu ce qu’il est; il m‘a fait voir des lettres ou on lui parle de son humeur; peut-etre avait-il plus de dispositions que nous? He bien, si nous venons au meme état, il sera plus a nous, cet étatl Vous me reproclrez mon trop de passion pour les femmes: vous avez raison; je m’en corrigerai peut-etre, mais vous devez sentir que la com- paraison n’est nullement recevable. Quant a l’amour pour la gloire, je ne pousserai la philosophie jusqu’a la mépriser; mais je crois aussi que, quand les occasions des cboses auxquelles on a donue ce nom ne se présentent pas, il faut tacher de la mettre en une bonue conduite, un parfait accomplissement de ses devoirs de toutes les especes, enfin, une entiere observation dece qu’un homme sense appelle la vertu ; du moins, pour me tranquilliser, veux-je le croire. Ainsi, si les occasions d’etre . utile a mes amis, a mes parents, aux hommes, enlln, et a ma patrie, si