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· 130 CORRESPON DANCE. mais, comme on peut entendre l’un ou l’aut:re le plus na- turellement du monde, je ne sais ou m’arreter; tirez-moi, je vous prie, d’incertitude, et entrez en des détails sur cela. Vous ne sauriez me faire plus de plaisir que de me parler de vous; et, si c’est la, comme vous dites, et comme on l’a dit avant vous, ce qui nous fait aimer le commerce de nos amis, je m’estime trop heureux qu’il y ait des moyens si faciles de serrer le notre, par des noeuds si agréables. Ce que je vous ai mandé sur la vieillesse n’est pas sans réponse, comme vous me l’aocordez par courtoisie. ll nous faut des occupations qui touchent notre coaur ou notre es- prit, ou nous tombons en langueur : la plupart des voluptés ne sont plus pour les vioillards; tous les plaisirs des sens . leur manquent, et il n’y a guere de passions a leur usage; mais les lettres peuvent etre cultivées jusqu’au tombeau, et _ c’est presque le seul objet qui soit en la puissance d’un vieillard, qui est honnete homme, et qui conserve sa rai- son, parmi ses infirmités; car, s’i1 radote,`je n’y sais plus rien. Mais ne trouvez·vous pas que je ressemble a ce per- sonnage de Moliere, qui ne veut avoir ni tort ni raison, de peur de tinir les disputes? Je vous avertis que si vous etes encore de mon avis, je reprends sur·le·champ ma premiere opinion. · Adieu, mon cher Mirabeau. Meyronnet est content de votre frere; je le suis infiniment, et Madame votre mere ne l’est pas; mais je n°en sais pas la raison. Je crains que vous ne fassiez un aifront a cette lettre : vous n’aurez jamais la . patience de la lire; mais c’est pour la derniere fois, je vous le promets; car les longues écritures me fatiguent plus que les longues lectures ne peuvent vous ennuyer. Ne soyez pas assez simple pour répondre a toutes ces sottises; on ne peut rien approfondir dans une lettre; on écrirait des volumes sur les plus petits sujets, si l’on en voulait considérer toutes les faces, en examiner tous les rapports, expliquer toutes ses pensées, et oter de ses expressions toute sorte d’équi- voques. Je vous enverrai mon adresse, quand nous partirons