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Mais il faut de cet Art tous les préceptes prendre,
Quand tu voudras parfait vn tel ouurage rendre :
Par ci par là meslé, rien ici tu ne lis,
Qui ne rende les vers d’vn tel œuure embellis.
Tel ouurage est semblable à ces fecons herbages.
Qui sont fournis de prez et de gras pastu rages,
D’vne haute futaye, et d’vn bocage épais,
Où courent les ruisseaux, où sont les ombres frais,
Où l’on void des estangs, des vallons, des montagnes,
Des vignes, des fruictiers, des forests, des campagnes :
Vn Prince en fait son parc, y fait des baslimens,
Et le fait diuiser en beaus appartemens ;
Les cerfs, soit en la taille, ou soit dans les gaignages,
Y font leurs viandis, leurs buissons, leurs ombrages ;
Les abeilles y vont par esquadrons bruyants
Chercher parmi les fleurs leurs viures rousoyants ;
Le bœuf laborieux, le mouton y pasture,
Et tout autre animal y prend sa nourriture.
En l’ouurage Héroïque ainsi chacun se plaist,
Mesme y trouue dequoy son esprit il repaist :
L’vn y tondra la fleur seulement de l’Histoire,
Et l’autre à la beauté du langage prend gloire ;
Vn autre aux riches mots des propoz figurez.
Aux enrichissemens qui sont elabourez ;
Vn autre aux fictions, aux contes délectables
Qui semblent plus au vray qu’ils ne sont véritables.
Bref, tous y vont cherchant, comme sont leurs humeurs,