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Car nos sçauans maieurs nous ont desia tracé
Vn sentier qui de nous ne doit estre laissé.
Pour ce ensuiuant les pas du fils de Nicomache,
Du liarpeur de Calabre, et tout ce qui remâche
Vide, et Minturne après, i’ay cet ceuure apresté,
Sire, l’accommodant au langage vsité
De vostre France, afin que la francoise Muse
Sans Art à l’auenir ne demeure confuse.
Mais qui selon cet Art du tout se formera
Hardiment peut oser tout ce qui luy plaira
Escriuant en francois ; ainsi vostre langage
Par ces vers ne reçoit vn léger auantage
Veu qu’il se trouue plus de comments mille fois
Au latin, que de vers en l’Art du Calabrois :
Et puis ce n’est pas peu de ioindre à vos domaines,
Sans dépence ou hasard, les dépouilles Romaines.
Mais tout par art se fait, tout par art se construit,
Par art guide les Naux le Nautonnier instruit,
Et sur tous le Poète en son dous exercice
Mesle auec la nature vn plaisant artifice ;
Tesmoin en est cet Art, qui par les vers conté,
A tous les autres arts aisément surmonté.
Comme on void que les voix fortement entonnées
Dans le cuyure étrecy des trompettes sonnées,
Iettent vn son plus clair, plus haut, plus souuerain,
Pour estre l’air contraint dans les canaux d’erain :
Ainsi les beaus desseins, plus clairs on fait entendre,