Page:Vaulabelle - Histoire des deux restaurations jusqu’à l’avènement de Louis-Philippe, tome 2.djvu/87

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
83
— 1814 —

« Le roi propose la loi. » Voilà quel était l’article. Un des commissaires, s’appuyant sur le droit d’initiative accordé par la constitution britannique à tous les membres du Parlement, demanda que le droit de proposer la loi appartint, comme en Angleterre, aux membres des deux Chambres. M. de Montesquiou se récria : il rappela les souvenirs de la Constituante et de la Législative, où ce droit avait produit, disait-il, toutes les lois hostiles au monarque et fatales à la Royauté. Évoquant, à cette occasion, le fantôme des révolutions, il finit par déclarer que le roi s’était formellement prononcé sur ce point. Aucune réplique n’était possible. Décidée cependant à ne pas renoncer, pour le pouvoir législatif, au droit de provoquer les mesures qu’il croirait utiles au pays et à la couronne elle-même, la majorité des commissaires essaya de recouvrer, dans un article additionnel, la faculté qu’on lui refusait. Différentes rédactions furent successivement proposées, puis rejetées ; enfin les commissaires parvinrent à obtenir la concession suivante :

« Les Chambres ont la faculté de supplier le roi de proposer une loi sur quelque objet que ce soit, et d’indiquer ce qu’il paraît convenable que cette loi contienne.

Cette demande pourra être faite par chacune des deux Chambres, mais après avoir été discutée en comité secret. Elle ne sera envoyée à l’autre Chambre par celle qui l’aura proposée qu’après un délai de dix jours.

Si la proposition est adoptée par l’autre Chambre, elle sera mise sous les yeux du roi ; si elle est rejetée, elle ne pourra être reproduite dans la même session. »

Cette concession, comme on le voit, n’était pas dangereuse. La couronne, libre toujours de sanctionner ou de repousser la proposition présentée par les deux autres branches du pouvoir législatif, conservait son droit intact ; sa volonté, dans aucun cas, ne pouvait être forcée. Cependant deux jours de discussion et d’instances avaient été nécessaires pour décider Louis XVIII à ce sacrifice, et pour arrêter les termes dans lesquels il consentait à l’accorder. Les trois paragraphes que nous