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que toute autre, demandait une consécration nouvelle. La discussion générale fut alors fermée, et l’abbé de Montesquiou put enfin soumettre à l’examen des commissaires les trois premiers articles du chapitre établissant les droits publics des Français. Ces articles, qui stipulaient l’égalité devant la loi, l’égalité dans l’assiette et dans le payement de l’impôt, ainsi que l’admissibilité de tous les citoyens aux emplois, furent approuvés sans discussion.

L’article 4 garantissait la liberté individuelle. Les sénateurs réclamèrent, comme un surcroît de garantie en faveur de cette liberté, le maintien de la commission spéciale chargée par le sénatus-consulte du 18 mai 1803, sous le nom de commission sénatoriale de la liberté individuelle, de veiller à l’exécution des lois qui assuraient la liberté de chaque citoyen. Les prisons d’État, avant 1803, n’étaient pas reconnues par la loi ; on arrêtait arbitrairement ; mais on avait toujours soin de donner à la détention des formes plus ou moins légales ; or ce fut précisément lorsque la commission de liberté fut instituée que les arrestations par simple mesure administrative ou de haute police, et les détentions sans jugement, se multiplièrent dans de telles proportions, que l’administration fut obligée de convertir plusieurs forteresses en prisons politiques. Le nombre de ces châteaux-prisons, sous l’Empire, était devenu deux et trois fois plus considérable que sous l’ancien régime. L’inutilité de la commission sénatoriale était donc surabondamment démontrée. Une majorité, formée par les commissaires du roi et par les députés, repoussa la demande des sénateurs, et l’article de MM. de Montesquiou, Ferrand et Beugnot, fut maintenu tel qu’ils l’avaient rédigé[1].

  1. À sept mois de là, la Chambre des députés, dans sa séance du 24 décembre 1814, entendait le rapport d’une pétition qui caractérise le rôle accepté par le Sénat sous le régime impérial, et donne la mesure de l’influence exercée par sa commission de liberté. Cette pétition, présentée par le maréchal de camp de Sol de Grisolles et par dix-huit autres anciens prisonniers d’État, exposait les faits suivants :
    Les pétitionnaires avaient été détenus administrativement, c’est-à-dire sans