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— 1814 —

vail du comité. Les sénateurs se montrèrent hésitants. Le prince de Bénévent parut approuver l’abbé. M. Lambrecht rédigea immédiatement un article où il était dit « que le peuple français appelait librement au trône Louis-Stanislas-Xavier, frère du dernier roi. » M. de Montesquiou, à la lecture de cette formule, s’indigna. « Comment ! s’écria-t-il, le peuple appelle Louis XVIII au trône ! mais c’est un mensonge, ce serait une monstruosité ! Jamais le roi n’a perdu ses droits, il n’a jamais cessé de régner. Ce n’est pas comme frère de Louis XVI, d’ailleurs, que lui appartient la couronne, mais comme oncle de Louis XVII, comme successeur immédiat de ce jeune prince, à qui son long martyre n’a pu enlever le titre de roi de France. Contesteriez-vous, par hasard, à Sa Majesté, le nom de Louis XVIII ? — Vous ne tenez donc aucun compte, répondit M. de Tracy, des faits intermédiaires ? Est-ce qu’il ne s’est rien passé depuis 1789 ? — Les faits ne peuvent rien contre le droit, » répliqua l’abbé.

L’inflexible logique de M. de Montesquiou embarrassait ses adversaires. Le Sénat, en rappelant les Bourbons, ne pouvait invoquer, en effet, en faveur des membres actuels de cette famille, ni ces qualités éminentes, ni ces grands services rendus qui commandent l’admiration ou la reconnaissance des nations. Le droit d’hérédité monarchique constituait le seul titre de ces princes. La déclaration de ce droit était donc inséparable de leur rappel au trône. M. de Talleyrand vint au secours des sénateurs. Il dit que tout ce débat, simple affaire de rédaction, serait facile à vider dès que le comité se serait mis d’accord sur les articles organiques. On passa immédiatement aux dispositions relatives à la composition et aux droits du Sénat, point capital du projet pour les sénateurs-commissaires.

Le nombre des titulaires était fixé à cent. Les sénateurs actuels composaient exclusivement l’Assemblée ; ils s’attribuaient un autre bénéfice : on n’a pas oublié les démarches et les sollicitations vaines du Sénat auprès de Napoléon, lors de l’établis-