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— 1814 —

29 avril, le jour même où Louis XVII arrivait à Compiègne, que Bernadotte quitta Paris. Aucun journal n’avait annoncé son arrivée ; deux lignes, jetées obscurément dans le Moniteur du 2 mai, apprirent son départ. Si l’ambition ne tue pas toute conscience, Bernadotte dut emporter des remords dans sa nouvelle patrie.

Le roi était arrivé vers les quatre heures du soir au château de Saint-Ouen, où il devait signer la déclaration convenue la veille avec Alexandre ; les deux souverains avaient arrêté que M. de Talleyrand la rédigerait.

Soumis par son auteur d’abord à une réunion de sénateurs assez nombreuse, puis à Alexandre, dont tous ces débats de principes flattaient singulièrement l’orgueil, le projet de cette déclaration fut apporté au roi par le prince de Bénévent ; sa lecture souleva un véritable orage dans le conseil privé de Louis XVIII ; il était ainsi conçu :

« Louis, par la grâce de Dieu, roi de France et de Navarre, à tous nos féaux et fidèles sujets, salut :

Rappelé par l’amour de notre peuple au trône de nos pères, instruit par l’expérience, éclairé par les malheurs de la nation généreuse que nous sommes appelé à gouverner, jaloux de sa prospérité plus que de notre pouvoir, pénétré de la nécessité de conserver autour de nous ce Sénat, aux lumières duquel nous reconnaissons devoir en partie notre retour dans notre royaume ; résolu, enfin, de faire pour la tranquillité publique tout ce qui ne portera pas atteinte aux droits de notre maison ainsi qu’à la dignité de notre couronne,

Nous avons déclaré et déclarons ce qui suit :

La Monarchie dont nous sommes le chef souverain aura une constitution, gage mutuel et sacré de la confiance des Français en leur roi et de notre amour pour eux. Nous maintiendrons le gouvernement représentatif tel qu’il existe aujourd’hui, divisé en deux corps, savoir : le Sénat, et la Chambre composée des députés des départements. L’impôt sera librement consenti. (Suivaient toutes les autres garanties contenues dans la réponse du comte d’Artois au Sénat[1].)

Tels sont les principes sur lesquels sera établie la Charte que nous jurerons et ferons jurer d’observer dès qu’elle aura été consentie par les corps représentatifs et acceptée par le peuple français. »

  1. Voyez page 34 de ce volume.