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— 1814 —

courtois ; mais, la malencontreuse cocarde ayant bientôt attiré ses regards, il ne put s’empêcher d’ajouter à la suite de quelques mots gracieux sur la gloire de l’armée et sur les exploits de ses chefs : « Depuis Vesoul jusqu’ici, j’ai passé au milieu d’une haie de cocardes blanches ». L’insinuation resta sans effet ; les maréchaux gardèrent leur cocarde.

Le cortége franchit la barrière à une heure et demie. Il ne tarda pas à quitter la rue du Faubourg-Saint-Martin pour entrer dans le faubourg Saint-Denis et descendre la rue de ce nom, qui devait le conduire à l’église Notre-Dame. Voici l’ordre du défilé : un corps de musique jouant l’air de Vive Henri IV ; un assez fort détachement de gardes nationaux à cheval, parmi lesquels on remarquait M. de Chateaubriand, et qui, tous, avaient leur chapeau orné d’une cocarde blanche et surmonté d’un long plumet blanc ; plusieurs bataillons de garde nationale infanterie, avec la cocarde blanche ; le comte d’Artois, monté sur un beau cheval blanc richement caparaçonné, et portant, sur l’uniforme de la garde nationale, la plaque et le cordon bleu de l’ordre du Saint-Esprit, la croix de Saint-Louis et l’ordre de la Toison d’or en sautoir ; l’état-major militaire dont nous avons parlé ; un fort détachement de gardes nationaux à cheval ; puis, derrière ceux-ci, une nombreuse troupe de cavaliers cosaques, formant la véritable escorte militaire du prince, et dont la présence caractérisait, avec le mélange des deux cocardes, l’événement ainsi que la situation.

La foule, partout où passait le cortége, était nombreuse ; elle se montrait curieuse, étonnée, plutôt qu’enthousiaste ; la plupart des spectateurs avaient surtout été entraînés par le désir de voir un membre de la famille des Bourbons, princes inconnus pour ceux qui n’avaient pas dépassé quarante-cinq ans. Aussi l’aspect du défilé eût-il été froid, sans les gardes nationaux à cheval, qui, agitant leurs sabres au-dessus de leurs têtes et poussant de toutes leurs forces les cris de Vive le Roi ! vivent les Bourbons ! donnaient l’impulsion à cette partie mou-