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— 1815 —

pouvait rentrer ; il se retira en Hollande, et ne revint en France qu’au moment où son libérateur échangea son titre de général contre celui de Premier Consul. Il sollicita et obtint alors de la bienveillance de ce dernier sa radiation, puis sa rentrée, ainsi que celle de bon nombre de ses amis et de membres de sa famille. La personnalité et le génie dominateur du nouveau chef de la République ne permettaient pas à M. de la Fayette de retrouver la position influente qu’il avait eue avant son exil volontaire et sa prison. D’un autre côté, le système de gouvernement qui s’établissait blessait profondément ses principes politiques ; il se tint à l’écart. Vainement Napoléon lui fit offrir une place dans le Sénat et un des grands cordons du nouvel ordre de la Légion d’honneur. Peu jaloux de descendre au rôle de satellite obscur de l’astre consulaire, puis impérial, M. de la Fayette refusa. Il aurait même combattu avec énergie le gouvernement, son système et ses actes, si l’opposition avait été possible ; mais la censure la plus impitoyable n’arrêtait pas seulement la pensée, même dans les livres ; aucune tribune n’était restée debout. Condamné durant douze années à l’inaction politique et au silence, M. de la Fayette supporta impatiemment cette retraite ; elle exalta son mécontentement ; sa juste aversion pour le despotisme impérial se transforma en une animosité pour ainsi dire personnelle envers le despote. Appelé à Paris par la mort d’un de ses parents, dans les derniers jours de mars 1814, il s’y trouvait lorsque les armées alliées parurent sous les murs de cette capitale. Le moment lui sembla venu de prendre enfin part à la politique active. Mais, tandis que le colonel de Labédoyère, les généraux Michel (de la garde), Chastel, Boyer de Rébeval et Boudin, oubliant leurs blessures, quittaient leurs demeures pour aller volontairement se mêler aux soldats de Mortier et de Marmont[1], M. de la Fayette cherchait

    de France, répondit-il, j’enverrais vingt mille hommes pour la délivrer. » (Benjamin Constant, Mémoires sur les Cent-Jours.)

  1. Voyez le premier volume, chap. vi.