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— 1815 —

se considéraient comme les alliés naturels de Louis XVIII et de son gouvernement, et on les entendait reprocher avec une égale amertume aux Bourbons l’accueil fait par ces princes aux bonapartistes, et l’influence accordée aux émigrés. « Du moment que le roi a donné une constitution, disaient-ils, il ne peut et ne doit s’appuyer que sur ceux qui en professent les principes. » Or les principes du gouvernement impérial, représentés par le général Clarke, duc de Feltre, et personnifiés dans le maréchal Soult, par exemple, se confondaient, en effet, en tant de points avec les principes des poursuivants d’ancien régime, qu’il était assez difficile de les séparer. L’opinion constitutionnelle comprenait plusieurs nuances : bon nombre de ses membres se trouvaient engagés fort avant dans les projets de renversement que nous avons racontés au début du précédent chapitre ; à la nouvelle du retour de l’île d’Elbe, ces membres n’hésitèrent pas à se rapprocher de Louis XVIII, et à unir leurs efforts à ceux des royalistes exclusifs contre l’homme qu’ils considéraient comme l’ennemi commun. On vit même accourir au secours des Bourbons menacés un personnage dont le rôle avait été fort influent au début de la Révolution, personnage qui devait occuper encore longtemps la scène politique, le général de la Fayette. Sa position veut être expliquée.

Les mêmes passions politiques qui avaient fait qualifier le roi Louis XVI de révolutionnaire, et qui voyaient un jacobin dans le roi Louis XVIII, donnaient à M. de la Fayette, en 1815, le nom de républicain ; ce nom ne lui appartenait pas encore, dans le sens absolu du mot : ami sincère, généreux, de la liberté, et fermement attaché aux principes de la démocratie, M. de la Fayette acceptait la Monarchie constitutionnelle comme une transaction entre le principe d’autorité et le dogme de la souveraineté populaire. Cette souveraineté était sa religion politique, et l’obéissance à la volonté nationale, librement exprimée, la règle de tous ses actes. Ce sentiment de soumission à la loi consentie par le pays dominait à ce