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— 1815 —

rendît à la Rochelle, position intermédiaire entre les deux bassins de la Loire et de la Gironde, entre la Bretagne, la Vendée et les provinces du Midi, et qui placerait S. M. au centre des départements les plus royalistes de la Monarchie. Protégé sur son front par le cours supérieur de la Loire, barrière que défendrait le loyal maréchal Saint-Cyr avec les troupes réunies à Orléans ; couvert sur sa droite par Bordeaux, où se trouvent M. le duc et madame la duchesse d’Angoulême ; à gauche, par Angers et Nantes, où vient de se rendre M. le duc de Bourbon, le roi ne serait pas seulement en parfaite sûreté, il pourrait encore, de la Rochelle, organiser et diriger la résistance d’une moitié du royaume. L’effort royaliste, ainsi concentré, aurait plus de vigueur et d’énergie, et, dans le cas où les événements ne répondraient pas aux espérances des amis de la Monarchie, la mer, restée libre, permettrait à S. M. de se retirer, soit en Angleterre, soit en Espagne. »

La hardiesse de cet avis effraya tous les auditeurs ; il offrait des chances sérieuses de résistance ; toutes les voix le proclamèrent impraticable.

Ces plans se heurtaient, se croisaient chaque jour, à toute heure, sans aboutir au moindre résultat ; tous venaient mourir au seuil du cabinet de Louis XVIII ; M. de Blacas n’avait garde de les lui soumettre. Vainement le priait-on d’instruire le roi. « Ah ! vous ne le connaissez pas, s’écriait-il ; il dirait que je ne lui apporte que de mauvaises nouvelles, et j’aurais à souffrir pendant huit jours de sa mauvaise humeur. »

Mais ce n’était pas seulement dans le cabinet du favori que l’on délibérait ; chaque salon des Tuileries, dans ces jours de trouble et de confusion, se trouvait, pour ainsi dire, transformé en salle de conseil, où une foule d’hommes et de femmes de la cour, mêlés aux officiers de garde, gardes nationaux ou gardes du corps, discutaient avec la plus grande vivacité de gestes et de paroles les moyens de sauver la Monarchie. « Nous avons eu des torts, disaient quelques vieilles duchesses, il faut regagner le peuple. » Plusieurs dames du