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— 1815 —

agitation, un pêle-mêle de propositions et de projets à ne pas s’entendre ; le dévouement débordait : généraux, simples officiers, préfets, corps municipaux, corps judiciaires, l’inoffensive milice de l’Université elle-même, en un mot tout ce qui tenait au budget jurait de se lever et de combattre, et, dans ses discours, dans ses Adresses, « mettait sa fortune et sa vie aux pieds d’un maître adoré. »

Le lendemain 18, à la suite d’un long article rempli d’invectives contre l’Empereur, et qui se terminait par ce cri, promesse de tous les gouvernements qui arrivent, recours suprême de tous les pouvoirs qui tombent : Vive la patrie ! Vive la liberté ! le Journal des Débats rapportait le fait suivant :

« Aujourd’hui, le ministre de la guerre, en traversant la salle des gardes du corps, aux Tuileries, leur a adressé les paroles suivantes :

« Messieurs, depuis huit jours vous ne dormez pas ; maintenant vous pouvez tirer vos bottes. Je dormirai cette nuit aussi tranquillement qu’il y a trois mois ; j’étais arrivé huit jours trop tard ; en ce moment tout est réparé : les états-majors, qui n’étaient pas organisés, sont aujourd’hui parfaitement composés, les officiers répondent de leurs régiments. Le général Marchand s’est emparé des derrières de Bonaparte et est rentré dans Grenoble ; il s’est emparé de l’artillerie que ce dernier y a laissée. »

L’Empereur approchait déjà de Fontainebleau, lorsque le général Clarke se décernait ce brevet de génie sauveur. Le lendemain 19, le même journal ajoutait :

« La désertion continue d’une manière étonnante dans la petite troupe de Buonaparte, particulièrement dans la cavalerie, dont il paraît qu’il ne lui reste plus que 300 ou 400 hommes. Si l’on en croit les bruits répandus ce matin, le général Marchand serait rentré dans Grenoble et l’aurait remise, aux acclamations unanimes des habitants, sous l’autorité du roi. D’autres bruits donnent lieu de penser que Lyon a de même secoué le joug de l’autorité momentanée que Buonaparte a fait peser sur cette ville ; les uns disent par un mouvement spontané des habitants, d’autres par suite de l’entrée d’un corps de troupes sous les ordres du maréchal Ney. »

À la même heure où la censure et la police faisaient publier dans les journaux ou afficher sur tous les murs de Paris ces étranges bulletins, les gardes du corps que le 6e lanciers avait