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— 1815 —

généraux, entre autres le général Bourmont, et, sur leurs avis, se décida pour ce dernier parti. Sa détermination venait d’être prise, lorsqu’un officier du général Bertrand lui remit une lettre ainsi conçue :

« Mon cousin, mon major général vous expédie l’ordre de marche. Je ne doute pas qu’au moment où vous avez appris mon arrivée à Lyon, vous n’ayez fait reprendre à vos troupes le drapeau tricolore. Exécutez les ordres de Bertrand, et venez me joindre à Cbâlons : je vous recevrai comme le lendemain de la bataille de la Moskowa.

Napoléon. »

L’Empereur avait déjà dépassé Châlons lorsque cette lettre arriva aux mains de Ney. Ce maréchal prit la route d’Auxerre, où il arriva à dix heures du soir ; il fit immédiatement demander le comte Bertrand, qui, après une courte entrevue, vint trouver l’Empereur : « Le maréchal, avant de se présenter devant Votre Majesté, dit le général Bertrand, veut recueillir ses idées, et justifier, par écrit, la conduite qu’il a tenue avant et depuis les événements de Fontainebleau. — Qu’ai-je besoin de justification ? répondit Napoléon. Dites-lui que je l’aime toujours et que je l’embrasserai demain. »

« Embrassez-moi, mon cher maréchal, dit Napoléon le lendemain en apercevant le prince de la Moskowa ; je suis bien aise de vous revoir ; je n’ai pas besoin d’explication ou de justification ; je vous ai toujours honoré et estimé comme le brave des braves. — Sire, les journaux ont avancé une foule de mensonges que je voulais détruire ; ma conduite a toujours été celle d’un bon soldat, d’un bon Français. — Je le sais ; aussi n’ai-je point douté de votre dévouement. — Vous avez eu raison, Sire ; Votre Majesté pourra toujours compter sur moi quand il s’agira de la patrie... car c’est pour la patrie que j’ai versé mon sang, et je suis encore prêt à le verser pour elle jusqu’à la dernière goutte. Je vous aime, Sire ; mais la patrie avant tout ! avant tout !... répétait le maréchal, que poursuivait en ce moment le souvenir des violences de Fontainebleau. — C’est le patriotisme qui me ramène aussi en