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— 1815 —

ment, ils chargèrent les gardes du corps, les obligèrent de prendre la fuite en abandonnant quelques prisonniers, et s’établirent sur cette importante position. Telle était, au reste, la sécurité de l’Empereur, que, lors du départ des troupes d’Auxerre, il avait transmis l’ordre suivant au général commandant l’avant-garde :

« Général Girard, on m’assure que vos troupes, connaissant le décret du 6[1], ont résolu, par représailles, de faire main-basse sur les royalistes qu’elles pourraient rencontrer. Vous ne rencontrerez que des Français ; je vous défends de tirer un seul coup de fusil : calmez vos soldats ; démentez les bruits qui les exaspèrent ; dites-leur que je ne voudrais pas entrer dans ma capitale à leur tête si leurs armes étaient souillées de sang français. »

Les Bourbons et leurs ministres tenaient un autre langage : il n’était pas un seul de leurs ordres qui ne portât la peine de mort au bout.

C’est à Auxerre, dont le préfet, M. Gamot, était beau-frère du prince de la Moskowa, que ce dernier rejoignit son ancien souverain. Le maréchal se trouvait en Normandie lorsque la nouvelle du débarquement de l’île d’Elbe était arrivée aux Tuileries. Louis XVIII le fit mander en toute hâte pour lui confier le commandement du petit corps d’armée réuni à Besançon et d’abord destiné au duc de Berri, que l’éloignement de tous les autres membres de sa famille obligeait de rester auprès du roi. Nous réservons pour le procès du maréchal les détails relatifs à l’audience que lui accorda Louis XVIII, et les faits qui le décidèrent à abandonner la cause des Bourbons. Nous dirons seulement que, parti de Paris avec la résolution sincère de servir cette cause, il fut impuissant à maintenir ses régiments dans l’obéissance au gouvernement royal ; que, placé, par leur révolte et par leur abandon, dans l’alternative de revenir seul à Paris ou de suivre ses soldats dans leur marche au-devant de Napoléon, il consulta ses principaux

  1. Voir le texte de cette ordonnance, page 187 de ce volume.