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— 1815 —

d’hommes, de vieillards, de femmes et d’enfants accourus de tous les points de la ville, des bourgs et des villages voisins, et qui se jetaient jusque sous les pieds des chevaux pour voir Napoléon de plus près, pour l’entendre, pour toucher ses vêtements. Quand cette foule avait fait quelques pas, elle courait, pour le revoir, sur un autre point, où se renouvelaient les mêmes scènes. C’était un véritable délire. Toute distinction de rangs avait disparu : maîtres et ouvriers, hommes du peuple et bourgeois, se pressaient les mains, s’embrassaient, et, bras dessus, bras dessous, allaient, venaient, poussaient les mêmes cris et s’abandonnaient aux démonstrations de la joie la plus vive. Napoléon confia la garde de sa demeure et de sa personne à l’infanterie de la garde nationale. Les gardes nationaux à cheval offrirent leurs services. « Nos institutions, répondit l’Empereur, ne reconnaissent point de garde nationale à cheval ; vous vous êtes si mal conduits, d’ailleurs, avec le comte d’Artois, que je ne veux point de vous. »

Napoléon passa les journées du 11 et du 12 mars à Lyon. Il reçut, comme à Grenoble, toutes les autorités, tous les corps constitués. Ce fut dans le chef-lieu du Rhône qu’il reprit l’exercice du pouvoir souverain. Maître de la seconde ville de l’Empire, et de huit à dix régiments ; salué une seconde fois Empereur par toutes les populations qu il venait de traverser, il tenait la cause des Bourbons pour une cause perdue ; leur règne était fini ; le sien devait recommencer. Neuf décrets signalèrent sa prise de possession du commandement suprême ; en voici l’analyse :

Le premier annulait tous les changements opérés dans les cours et tribunaux, et rétablissait dans leurs fonctions les membres éliminés injustement ou par esprit de réaction : les individus qui les avaient remplacés devaient immédiatement cesser leurs fonctions. Le deuxième ordonnait à tous les généraux et officiers de terre et de mer, introduits dans l’armée depuis le 1er avril 1814 et qui avaient émigré, ou qui, n’ayant pas émigré, avaient quitté le service en 1792, de cesser sur-le-