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— 1815 —

dans les villes, l’empressement sur lequel il avait eu la simplicité de compter, Bonaparte s’était réfugié sur la crête des montagnes. » C’est le 8 que le Journal des Débats, entre autres, publiait ces nouvelles, et, ce jour-là même, Napoléon passait des revues à Grenoble. Les journaux du lendemain 9 donnaient quelques dépêches datées précisément de cette ville. L’une d’elles, à la date du 4, était ainsi conçue : « La nouvelle du débarquement de Bonaparte a produit la plus vive indignation parmi les habitants de Grenoble et des campagnes voisines ; les chefs de la force armée viennent de se réunir à l’hôtel de la préfecture ; ils y ont combiné tous les moyens de défense, dans le cas très-improbable où le petit corps des brigands de Bonaparte songerait à se diriger sur cette ville. Une partie de la garnison vient de se mettre en route pour marcher contre lui. » Une autre dépêche accusait l’Empereur d’avoir volé les chevaux d’un de ses anciens chambellans, le prince de Monaco, qu’il avait rencontré entre Cannes et Antibes. Un post-scriptum du Journal des Débats ajoutait : « Les dernières nouvelles de Bonaparte sont d’hier 7 ; à cette date, il était toujours aux environs de Digne, dont on lui avait refusé les portes. Personne ne s’était réuni à lui. Par la marche des différents corps partis de divers points pour l’attaquer, il devait dans ce moment être entièrement cerné. On a sonné le tocsin dans tous les villages, et les paysans se sont armés pour lui courir sus. »

Voilà les fables ridicules que le gouvernement faisait imprimer quand l’Empereur frappait déjà aux portes de Lyon. Les royalistes prenaient ces contes au sérieux ; leurs adversaires, et c’était l’immense majorité de la population, se bornaient à hausser les épaules ; ils ne connaissaient rien à la marche de Napoléon, ils ne savaient rien ; mais ils avaient foi dans le patriotisme des départements qu’il traversait, dans le dévouement des troupes qu’il pourrait rencontrer et dans son génie. Ce fut seulement dans la nuit suivante (du 9 au 10) que ses premières proclamations parvinrent à Paris. On raconte que,