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— 1814 —

leur position à un enchaînement de circonstances qu’ils n’avaient ni préparées ni prévues. Trois des premières mesures prises par eux peuvent caractériser leur administration.

S’il existait une force que le nouveau gouvernement avait surtout intérêt à rallier à lui, c’était l’armée : parmi les nombreux chefs militaires alors présents à Paris, il s’en trouvait un, le général Dupont, dont le nom, pour les soldats, était un nom déshonoré ; cette déconsidération devint son titre pour obtenir le ministère de la guerre ; il reçut, le 4 avril, le portefeuille de ce département. En second lieu, l’ordre de la Légion d’honneur, à cette époque, était, pour ainsi dire, un ordre tout militaire ; ce ne fut ni un maréchal, ni une haute notabilité politique, que M. de Talleyrand en nomma le grand chancelier et le grand trésorier, mais un prêtre que dominait une passion désordonnée pour la politique et pour l’intrigue, l’abbé de Pradt, archevêque de Malines. Enfin, la constitution sénatoriale publiée le 8 avril garantissait la complète liberté de la presse, et un des motifs du décret de déchéance était basé sur les atteintes portées par l’Empereur à cette liberté ; le lendemain 9, M. de Talleyrand et ses collègues rétablissaient la censure, et la centralisaient, pour tous les journaux autres que le Moniteur, dans les mains de M. Michaud, membre de l’Institut.

Le 10, le gouvernement provisoire publia un arrêté qui nécessite quelques explications.

Le baron Louis, en prenant la direction du Trésor, n’avait trouvé que des caisses vides. Le numéraire existant à la Trésorerie, le 29 mars, avait été transporté à Blois. Ce n’étaient pas les recettes faites à Paris dans ces premiers jours de confusion et d’inquiétude générales qui pouvaient remplir les coffres du nouveau gouvernement. D’un autre côté, non-seulement les communications de la capitale avec les départements placés au delà d’un certain rayon se trouvaient momentanément interrompues, mais les désordres inséparables de la lutte et du passage ou de l’occupation des troupes