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— 1814 —

soulevées par des pétitions sans intérêt, conversations mal engagées, plus mal soutenues, et où se montraient l’inexpérience et l’incertitude de l’Assemblée, voilà les seuls débats qui avaient rempli ses séances durant les deux premiers mois. Lors donc que vint le jour indiqué pour la discussion du projet de loi sur la liberté de la presse, le premier, au reste, que le gouvernement eût encore présenté à la Chambre, un nombre considérable de curieux, attirés par la nouveauté de l’événement et par l’intérêt qui s’attachait à cette question fondamentale, s’emparèrent de la salle, dès l’ouverture des portes. Les escaliers, les couloirs intérieurs, les tribunes, tout, jusqu’aux bancs réservés aux députés, avait été immédiatement envahi. Vainement le président, lorsqu’il fut monté à son fauteuil, donna aux spectateurs, entassés dans l’intérieur de l’enceinte, l’ordre de laisser la place libre ; personne ne bougea. La plupart de ces obstinés curieux avaient été introduits par les députés eux-mêmes : le président, M. Lainé, ne voulut pas employer la force pour se faire obéir ; il prit un moyen plus prompt et plus sûr : il leva la séance, et la renvoya au lendemain. Les précautions, ce jour-là, furent mieux concertées. La discussion put commencer. Elle se traîna pendant plusieurs séances sans offrir l’intérêt auquel on s’attendait. Les députés, arrivant tous à la tribune avec des discours écrits, s’y succédaient sans jamais se répondre ; les arguments offraient la même monotonie que le débit ; les orateurs de chaque parti reproduisaient à satiété les mêmes considérations. Des deux côtés, le débat resta faible, décoloré, le dictionnaire et ses définitions y jouèrent le plus grand rôle. La discussion durait depuis cinq jours, lorsque, le 11, inquiet du nombre des opposants et des sympathies qui accueillaient au dehors chacune de leurs paroles, le ministère prit le parti de transiger ; M. de Montesquiou consentit, au nom du roi, à substituer dans le premier article le chiffre de vingt feuilles d’impression à celui de trente feuilles ; à exempter de la censure préalable la publication des opinions des membres de la