une constitution libérale... nous convoquerons le Sénat et le Corps législatif, nous engageant à mettre sous leurs yeux le travail que nous aurons fait avec une commission... » avait dit Louis XVIII à Saint-Ouen. « Rappelé par la divine Providence, dans nos États, après une longue absence... cherchant à renouer la chaîne des temps, que de funestes écarts avaient interrompue... nous avons accordé et accordons, fait concession et octroi... » disait le préambule du nouvel Acte constitutionnel. Ces différences ne furent pas immédiatement remarquées. Loin de là ; des-cris prolongés de Vive le roi ! éclatèrent dans toute la salle dès que M. Ferrand eut achevé la lecture de la nouvelle constitution. Par un emportement de servilité qui n’étonnera pas de la part de tels hommes, les anciens membres de ce Sénat que la Charte supprimait, au mépris de la déclaration de Saint-Ouen, étaient, de tous les assistants, ceux dont la joie se montrait la plus bruyante. Quand les transports enthousiastes de toute cette élite légale des notables du royaume[1] furent apaisés, M. Dambray remit aux mains du roi la liste des nouveaux pairs. Louis XVIII appela lui-même les noms des anciens ducs et pairs, des ducs héréditaires et à brevet ; les noms des autres pairs furent appelés par le chancelier, qui fit également l’appel des députés. Chaque membre, à mesure que son nom était prononcé, se levait et prêtait serment de fidélité au roi et à la Charte. Pas un seul d’entre eux, pour la plus minime affaire d’intérêt privé, n’aurait engagé sans examen et sans réflexion sa signature ou sa parole, et tous, sans hésiter, s’empressèrent de jurer une obéissance inviolable, éternelle, aux soixante-seize articles du pacte dont ils entendaient pour la première fois la rapide lecture. Si, du moins, ils n’avaient contracté que pour eux ! Mais leur prétention allait plus loin : comme représentants de la France officielle et légale, tous entendaient engager, par leur serment, trente millions de citoyens, qui
- ↑ Expression du discours de M. Dambray.
