Page:Vaulabelle - Histoire des deux restaurations jusqu’à l’avènement de Louis-Philippe, tome 2.djvu/102

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
98
— 1814 —

La gloire des armées françaises n’a reçu aucune atteinte ; les monuments de leur valeur subsistent, et les chefs-d’œuvre des arts nous appartiennent désormais par des droits plus stables et plus sacrés que ceux de la victoire.

Les routes du commerce, si longtemps fermées, vont être libres. Le marché de la France ne sera plus seul ouvert aux productions de son sol et de son industrie ; celles dont l’habitude lui a fait un besoin, ou qui sont nécessaires aux arts qu’elle exerce, lui seront fournies par les possessions qu’elle recouvre. Elle ne sera plus réduite à s’en priver ou à ne les obtenir qu’à des conditions ruineuses. Nos manufactures vont refleurir, nos villes maritimes vont renaître, et tout nous promet qu’un long calme au dehors et une félicité durable au dedans seront les heureux fruits de la paix.

Un souvenir douloureux vient toutefois troubler ma joie. J’étais né, je me flattais de rester toute ma vie le plus fidèle sujet du meilleur des rois, et j’occupe aujourd’hui sa place ! Mais du moins il n’est pas mort tout entier, il revit dans ce testament qu’il destinait à l’instruction de l’auguste et malheureux enfant auquel je devais succéder ! C’est les yeux fixés sur cet immortel ouvrage, c’est pénétré des sentiments qui le dictèrent, c’est guidé par l’expérience et secondé par les conseils de plusieurs d’entre vous, que j’ai rédigé la Charte constitutionnelle dont vous allez entendre la lecture, et qui assoit sur des bases solides la prospérité de l’État.

Mon chancelier va vous faire connaître avec plus de détail mes intentions paternelles. »

Cette parole simple et digne, empreinte, dans plusieurs passages, d’une véritable noblesse, provoqua de longs applaudissements. Quand l’enthousiasme fut un peu calmé, M. Dambray, chancelier, lut à son tour un long discours, commentaire aussi impertinent que maladroit sur l’origine et l’esprit de « l’ordonnance de réformation, dont Louis XVIII daignait accorder le bienfait à la France. » Comparée au préambule de la déclaration de Saint-Ouen, cette dissertation indiquait un assez notable changement dans les idées de la nouvelle royauté. Le contraste devint encore plus frappant quand on entendit les considérations historiques et politiques placées en tête de la Charte, et dont M. Ferrand, lorsque le chancelier fut assis, donna lecture à l’Assemblée. « Rappelé par l’amour de notre peuple au trône de nos pères... résolu d’adopter