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— 1814 —

la lettre close que, suivant l’antique usage, le grand maître des cérémonies fit remettre à tous les membres qui devaient assister à cette première séance. Tous les députés, en revanche, se trouvaient convoqués ; il est vrai que M. Bonnet de Treyches, le seul régicide que le Corps législatif comptât dans son sein, avait envoyé sa démission quelques jours auparavant.

Cette solennité, où Louis XVIII devait enfin faire connaître le nouvel Acte constitutionnel, était impatiemment attendue. Elle eut lieu au Palais-Bourbon. Le roi s’y rendit, accompagné de tous les membres de sa famille. Les dispositions, dans l’intérieur de la salle, étaient les mêmes que sous le gouvernement impérial ; l’accueil fut semblable. Les acclamations de l’Assemblée partirent au même moment où elles se faisaient entendre quand paraissait l’Empereur : c’étaient les mêmes hommes, revêtus des mêmes costumes, faisant éclater les mêmes transports, ayant la même attitude, accueillant le maître avec les mêmes sourires ; le maître et les cris étaient seuls changés. L’Assemblée, quand Louis XVIII entra, se tenait debout et découverte ; une fois sur son trône, le roi, assis et couvert, invita par un signe chacun à s’asseoir, et, d’une voix lente, mais forte, lut le discours suivant :

« Messieurs, lorsque pour la première fois je viens dans cette enceinte m’environner des grands corps de l’État, des représentants d’une nation qui ne cesse de me prodiguer les plus touchantes marques de son amour, je me félicite d’être devenu le dispensateur des bienfaits que la divine Providence daigne accorder à mon peuple.

J’ai fait avec la Russie, l’Autriche, l’Angleterre et la Prusse, une paix dans laquelle sont compris leurs alliés, c’est-à-dire tous les princes de la chrétienté. La guerre était universelle ; la réconciliation l’est pareillement.

Le rang que la France a toujours occupé parmi les nations n’a été transféré à aucune autre et lui demeure sans partage. Tout ce que les autres États acquièrent de sécurité accroît également la sienne, et par conséquent ajoute à sa puissance véritable. Ce qu’elle ne conserve pas de ses conquêtes ne doit donc pas être regardé comme retranché de sa force réelle.