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— 1814 —

jusqu’à l’ineptie ; et cependant il est mort laissant après lui la réputation d’un homme politique de premier ordre[1].

L’empereur de Russie quitta Paris le 2 juin ; le roi de Prusse partit le lendemain. La garde nationale parisienne, ce jour-là, releva les troupes alliées dans tous les postes qu’elles occupaient à l’intérieur de la ville. Alexandre et Frédéric-Guillaume se dirigeaient vers l’Angleterre. Ces deux souverains, qui avaient imposé à Louis XVIII le travail constitutionnel terminé cinq jours auparavant, devaient, dans ce voyage, être reçus membres de l’université d’Oxford, et se voir conférer les grades de docteurs en droit et en théologie.

L’ouverture des Chambres, d’abord fixée au 10 juin par la déclaration de Saint-Ouen, ensuite au 31 mai par une ordonnance du 6 mai, puis au 4 juin par une ordonnance du 30 mai, eut enfin lieu au dernier jour indiqué. La déclaration du 2 mai, ainsi que l’ordonnance du 6, convoquait le Corps législatif et le Sénat ; l’ordonnance de convocation du 30 ne faisait mention que du Corps législatif seul. Le Sénat, en effet, n’existait plus : non-seulement la Charte substituait à cette Assemblée une Chambre des pairs, mais nombre de sénateurs, en outre, ne devaient point faire partie du nouveau corps. Ce fut encore M. de Talleyrand qui dressa la liste des exclusions. Les sénateurs régicides reçurent les premiers coups ; tous furent repoussés sans exception. Les quelques sénateurs auxquels on donnait le nom de républicains, ceux-là mêmes qui, en prenant l’initiative du décret de déchéance, avaient le plus activement contribué au rappel des Bourbons, reçurent le prix de cet acte aveugle : la plupart furent éliminés à leur tour. Enfin, le prince de Bénévent dut rayer les noms d’un certain nombre de membres à qui Louis XVIII faisait l’honneur fort immérité d’un inaltérable attachement au gouvernement déchu. Aucun des sénateurs ainsi exclus ne reçut

  1. On pourra encore mieux juger M. de Talleyrand, comme homme politique, lorsqu’on aura lu ce que nous avons à dire plus loin de la part qu’il prit au congrès de Vienne.