Page:Vaulabelle - Histoire des deux restaurations jusqu’à l’avènement de Louis-Philippe, tome 1.djvu/398

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
393
— 1814 —

de sa propre grandeur, se trouvait aux prises avec des dévouements fatigués, des intérêts repus, impatients de soustraire leurs honneurs et leur fortune aux hasards d’une plus longue lutte, se termina comme avaient fini les discussions soulevées à Düben et à Saint-Dizier : Napoléon céda ; il prit une plume, et, d’une main émue, écrivit la déclaration suivante :

« Les puissances alliées ayant proclamé que l’empereur Napoléon était le seul obstacle au rétablissement de la paix en Europe, l’empereur Napoléon, fidèle à son serment, déclare qu’il est prêt à descendre du trône, à quitter la France et même la vie pour le bien de la patrie, inséparable des droits de son fils, de ceux de la régence de l’Impératrice et du maintien des lois de l’Empire.

Fait en notre palais de Fontainebleau, le 4 avril 1814.

Napoléon. »

L’Empereur se leva, tendit le papier aux maréchaux et leur dit : « Tenez, messieurs ! eh bien, êtes-vous contents ? » Puis, se promenant à grands pas, il ajouta : « Messieurs, il faut aller à Paris défendre les intérêts de mon fils, les intérêts de l’armée, les intérêts de la France, surtout ! Je nomme, pour mes commissaires, le duc de Vicence, les maréchaux prince de la Moskowa et duc de Raguse... — Êtes-vous contents ? Tous ces intérêts ne vous semblent-ils pas en bonnes mains ? — Oui, Sire, » répondirent les maréchaux d’une commune voix. L’Empereur, cessant de marcher, s’assit alors sur un petit canapé placé près d’une fenêtre : l’émotion qu’il cherchait à vaincre devint, à la fin, la plus forte ; il se leva de nouveau : « Non ! non ! s’écria-t-il, point de régence ! Avec ma garde et le corps de Marmont, je serai demain dans Paris ! » Les maréchaux se recrièrent ; Ney dit quelques mots ; Napoléon, passant rapidement et à diverses reprises sa main sur son front, s’arrêta, et, regardant les maréchaux, leur dit d’une voix forte et impérieuse : «Retirez-vous, messieurs ! »

Si, dans ce moment, Napoléon, traversant le groupe de ses