Page:Vaugelas - Remarques sur la langue françoise, tome 1, 1880.djvu/88

Cette page n’a pas encore été corrigée

toutes sortes de styles, si vous en exceptez le satyrique, le comique, en sa propre et ancienne signification, et le burlesque, qui sont d'aussi peu d'étendue que peu de gens s'y adonnent. Voici donc comme on définit le bon Usage. 3. C'est la façon de parler de la plus saine partie de la Cour, conformément à la façon d'écrire de la plus saine partie des Auteurs du temps. Quand je dis la Cour, j'y comprends les femmes comme les hommes, et plusieurs personnes de la ville où le Prince réside, qui par la communication qu'elles ont avec les gens de la Cour participent à sa politesse. Il est certain que la Cour est comme un magasin, d'où notre langue tire quantité de beaux termes pour exprimer nos pensées, et que l'Éloquence de la chaire, ni du barreau n'aurait pas les grâces qu'elle demande, si elle ne les empruntait presque toutes de la Cour. Je dis presque, parce que nous avons encore un grand nombre d'autres phrases, qui ne viennent pas de la Cour, mais qui sont prises de tous les meilleurs Auteurs grecs et latins, dont les dépouilles font une partie des richesses de notre langue, et peut-être ce qu'elle a de plus magnifique et de plus pompeux.4. Toutefois quelque avantage que nous donnions à la Cour, elle n'est pas suffisante toute seule de servir de règle, il faut que la Cour et les bons Auteurs y concourent, et ce n'est que de cette conformité qui se trouve entre les deux, que l'Usage s'établit. 5. Ce n'est pas pourtant que la Cour ne contribue incomparablement plus à l'Usage que les Auteurs, ni qu'il y ait aucune proportion de l'un à l'autre. Car enfin la parole qui se prononce, est la première en ordre et en dignité, puisque celle qui est écrite n'est que son image, comme l'autre est l'image de la pensée. Mais le consentement des bons Auteurs est comme le sceau, ou une vérification, qui autorise le langage de la Cour, et qui marque le bon Usage, et décide celui qui est douteux. On en voit tous les jours les effets en ceux qui s'étudient à bien parler et à bien écrire, lorsque se rendant assidus à la lecture des bon Ouvrages, ils se corrigent de plusieurs fautes familières à la Cour,