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l'autre. 3. Quant à ce grand nombre d'allégations qu'ils ont ramassé contre le soin de la pureté, il n'y en a pas une seule qui prouve ce qu'ils prétendent, ni qui en approche. Car qui serait l'Auteur célèbre ou médiocrement sensé, qui se serait avisé de dire qu'il ne faut point se soucier de parler ni d'écrire purement? Elles sont toutes, ou contre ceux qui ont beaucoup plus de soin des paroles que des choses, ou qui pèchent dans une trop grande affectation, soit de paroles, soit de figures, soit de périodes, ou qui ne sont jamais satisfaits de leur expression, et qui ne croient pas que la première qui se présente puisse jamais être bonne; qui sont toutes choses que nous condamnons aussi bien qu'eux, et qui n'ont rien de commun avec le sujet que nous traitons. Il ne faut que voir dans leur source les passages qu'ils ont cités, pour justifier tout ce que je dis. Car pour le Grammairien Pomponius Marcellus, ces Messieurs se font accroire qu'il s'était rendu extrêmement importun et même ridicule, à force d'être exact observateur de la pureté de sa langue. Suetone, de qui ils ont pris ce passage, ne dit nullement cela. Je ne veux pas dire aussi qu'on l'ait allégué non plus que les autres, de mauvaise foi, je croirais plutôt que c'est par surprise, ou par négligence, et faute de le lire attentivement. Parce que tout le blâme que donne Suetone à ce Grammairien ne consiste qu'un sa façon de procéder, et non pas au soin qu'il avait de la pureté du langage. Car voici l'histoire en deux mots: il plaidait une cause, et Cassius Severus, qui plaidait contre lui, parlant à son tour, fit un solécisme. Ce pédant qui se devait contenter de l'en railler en passant, comme eût fait un honnête homme, s'emporte contre lui avec tant de violence, et lui reprocha si souvent cette faute que, ne cessant de crier et de redire toujours la même chose avec exagération, il se rendit insupportable. Cassius Severus, pour s'en moquer, demanda du temps aux Juges, afin que sa partie pût se pourvoir d'un autre Grammairien, parce qu'il voyait bien qu'il ne s'agissait plus que d'un solécisme, qui était devenu