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SAINT-GÉRAND-LE-PUY


Verjus s’attache à lui. Ce bon Père était richement pourvu de connaissances pratiques : maçonnerie, charpenterie, menuiserie, la peinture même et le reste ; sans compter qu’il avait apporté les manuels Roret, sorte d’encyclopédie des arts et métiers, sciences théoriques et pratiques, etc., dont le Frère faisait ses délices. Dès ce temps-là, en prévision de l’avenir, il s’appliquait à tous les métiers.

Son désir des Missions allait grandissant. Un jour, il aperçut dans la bibliothèque une vie du P. Chanel, premier Missionnaire et martyr de l’Océanie centrale. Il la demanda, la lut et la relut. Pendant les promenades, à l’heure du repos, il appelait le frère Georges Mayer. Tous les deux s’écartaient des groupes où l’on causait et s’asseyaient à l’ombre. Là, ils ouvraient la vie du bienheureux Mariste, et, lentement, à qui mieux mieux, en savouraient l’austère douceur. Ils n’interrompaient leur lecture que pour s’enflammer mutuellement du désir de l’apostolat lointain et du martyre.

Un autre jour, c’est la vie du vénérable Joseph Marchand, martyrisé en Cochinchine, qui lui tombe sous la main. « Je viens de lire le martyre de M. Marchand. J’avais mal à la tête et au cœur. Cette lecture m’a relevé. Je veux tout supporter. Ô mon Jésus, comme je vous remercierais, si vous m’accordiez un martyre aussi cruel que celui-là ! »

Or, on ne peut lire sans horreur ce qu’eut à souffrir ce vaillant Missionnaire. Une première fois, les bourreaux lui ont déchiré avec des pinces la chair des jambes et des cuisses. Quinze jours plus tard, comme des cicatrices commençaient à se former, on renouvela le même supplice avec des tenailles rougies à blanc : les plaies ardentes fumaient. Au milieu de ces tortures, le martyr confessait la foi de Jésus-Christ. Enfin, on l’attache à un poteau. Deux hommes, ou plutôt deux monstres que le tam-tam accompagne, déchirent d’abord la peau des sourcils et la rabattent sur les yeux, puis, avec leurs tenailles, saisissent la poitrine du patient, la tirent, la tordent, la coupent et en jettent par terre les lambeaux sanglants. L’héroïque vic-