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LA PETITE-ŒUVRE

En juin 1873, le mois des grands pèlerinages, le Berry envoya une députation à Paray-le-Monial. Paray, c’est tout à la fois le berceau de la dévotion au Cœur de Jésus et le tombeau de la glorieuse visitandine qui en fut l’apôtre. Les Missionnaires d’Issoudun étaient là, escortant la bannière de Notre-Dame du Sacré-Cœur. Les élèves de rhétorique représentaient le juvénat. Deux élèves de sixième représentaient la Petite-Œuvre. L’un était Henry. C’est assez dire l’estime qu’avaient pour lui ses maîtres.

Peut-être aussi l’avait-on choisi pour sa voix. Il avait une belle voix de soprano dans laquelle passait son âme. À l’entendre, à la chapelle, chanter des cantiques avec tant d’émotion et de piété, on priait mieux et l’on devenait meilleur. Sans maître, il jouait aussi de l’harmonium, et d’aucuns prétendent qu’il accompagnait bien le plainchant. Au besoin, pour être agréable à ses condisciples, il se faisait compositeur. « Je me rappelle, lisons-nous dans les notes d’un contemporain, avoir chanté, un soir d’Épiphanie, une jolie bluette, intitulée : le Roi de la Fève, dont la musique était de lui. »

Henry excellait déjà dans la déclamation, surtout la comique. Sans tomber dans la charge ou la bouffonnerie, il lançait les mots, les regards, les gestes, les saillies, d’une manière si spirituelle et si plaisante qu’il déridait les plus graves et enlevait les applaudissements. « Je le vois encore, dit un bon juge, costumé en Scaramouche, dans la pièce intitulée : Qui casse les verres, les paie, et faisant, d’une mine impayable, mille évolutions drôles. » Son triomphe était la Chanson de Robinson :

Mes enfants, faut que j’vous raconte
Les aventur’s de Robinson.
C’est un’ histoire qu’est pas un conte
Et qui contient plus d’un’ leçon...

Comme il s’agit d’aventures dans cette chansonnette, de voyages sur mer, d’îles lointaines, de combats avec les sauvages, Henry était là dans son élément. Avec quel accent il chantait, surtout le dernier couplet, ce couplet