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MONSEIGNEUR HENRY VERJUS

OLEGGIO — SEYNOD — ANNECY

I

Le 16 août 1861, au matin, un homme sortait d’Oleggio, petite ville du Piémont, avec deux voitures de déménagement. Une femme s’était installée, comme elle avait pu, parmi les meubles et les ustensiles de ménage, avec ses deux enfants. L’un avait trois ans : il s’appelait Jean ; l’autre avait quinze mois : il s’appelait Henry. C’étaient de ces pauvres gens que le Sauveur Jésus aimait.

La femme était bien triste. Elle venait de quitter son père et sa mère. Elle s’en allait dans un pays dont elle ignorait la langue.

L’homme non plus ne partait point sans émotion. Carabinier dans l’armée sarde, Philippe Verjus était resté une vingtaine d’années en garnison à Oleggio. C’est là qu’après avoir été admis à la retraite, il avait épousé Laure Massara, pieuse jeune fille qui lui avait donné deux enfants. Jamais peut-être il n’aurait songé à regagner la Savoie, son pays natal, s’il avait pu obtenir du gouvernement italien la pension sur laquelle il comptait en sa qualité de militaire. Mais, quand il la réclama, on le renvoya au gouvernement français. Effectivement, comme il était Savoyard d’origine et qu’il n’avait pas opté pour l’Italie, il était, par le fait même de l’annexion de la Savoie à la France, devenu Français. Le gouvernement de Napoléon III lui fit la modique pension de trois cent soixante francs par an ; un franc par jour. C’est peu pour quatre personnes ; mais, Dieu aidant, et, avec du travail, personne ne mourra de faim. Et le cara-