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LES DEMI-SEXES

protection, et à manœuvrer dans la vie avec l’aplomb et le scepticisme qui viennent si vite maintenant à la jeunesse. Elle s’était habituée à discuter ses intérêts, à diriger une maison et à en faire les honneurs. Parmi les habitués se trouvaient quelques artistes qui avaient formé son jugement et aiguisé son esprit naturellement indépendant.

Puis, quand elle fut grande, elle fit, parmi les connaissances anciennes, un choix suivant ses goûts. Les premiers admis devinrent des intimes, formèrent un fond, en attirèrent d’autres, donnant aux salons de la baronne de Luzac l’allure d’une petite cour où chacun apportait un nom ou quelque titre spécial.

Les demandes de présentation et d’invitation affluaient ; les dîners du jeudi devinrent célèbres. Des débuts d’acteurs, d’artistes et de jeunes esthètes y eurent lieu. Des inspirés neurasthéniques et chevelus y remplacèrent, près du piano, des violonistes hongrois et des chanteuses épileptiques.

Camille s’abandonnait déjà à ses penchants un peu bohèmes, tout en demeurant correcte dans ses fantaisies et modérée dans ses audaces.

Au fond, elle était une de ces détraquées