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UNE VENGEANCE

y a longtemps déjà. Comment Madame n’est-elle point remontée ?…

» Le nègre me barrait le chemin ; je l’écartai brutalement, et me précipitai à travers les chambres, criant, vociférant de désespoir et de rage.

» La nuit se passa ainsi. Aux premières lueurs de l’aube, je partis dans la campagne, au hasard, sondant les buissons, écartant les hautes fougères, jetant, de tous côtés, des regards obscurcis par les pleurs.

» A midi, je rentrai, brisé, exténué ; elle n’avait pas reparu.

» Pendant huit jours, j’errai dans les bois, interrogeant les paysans, fouillant tous les recoins feuillus, toutes les anfractuosités, tous les ravins, plus malheureux que le plus misérable vagabond, plus abandonné que le chien perdu au fond d’un précipice. J’enviais le casseur de pierre qui, sous le soleil de midi poursuit son rude labeur ; j’aurais voulu ensanglanter mes mains, broyer mes os, martyriser mon corps pour ne plus rien sentir que la douleur physique.

» Pas un indice, rien ! Porto l’avait laissée dans la bibliothèque, il ne savait ce qu’elle était devenue, et semblait désolé de sa disparition.

» Pourtant, j’espérais encore : Nous n’avions pas d’ennemis, et aucun meurtre n’avait jamais été commis dans la contrée. Quel mobile aurait