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NIHILISTE

bras, et, avec mille précautions, je la déposai sur un divan du hall. Elle reprit lentement ses sens à la chaleur du foyer et, le cœur palpitant d’émotion, je pus l’interroger.

— Que vous est-il donc arrivé ? Vous êtes-vous fait mal en tombant ?… Je vous en prie ! cessez de me considérer comme un ennemi ! Répondez moi, afin que je puisse vous aider… vous secourir.

Elle eut un rire amer qui découvrit ses petites dents blanches convulsivement serrées. Je lui pris la main, et mettant dans ma voix le plus de douceur et de persuasion qu’il me fut possible :

— Je vous jure que je vous suis tout dévoué ; que, quoi que vous exigiez, vous serez obéie. Mais parlez… dites-moi quelque chose !

Elle passa lentement la main sur son front, et laissa tomber ces horribles paroles :

— J’ai faim !

Je me précipitai dans l’appartement et lui apportai, pêle-mêle, de la viande, des fruits, du pain et du vin. Elle mangea avec avidité, puis, ayant trempé ses lèvres dans un verre de bordeaux, elle me regarda avec une certaine reconnaissance.

— Je crois que, sans vous, je serais morte dans cette neige.

— Comment est-il possible que vous en soyez arrivée là ?