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PREFACE.

ſuffit pas de ſçavoir ce que la Loi de la Nature preſcrit aux individus humains. L’application d’une régle à des ſujets divers, ne peut ſe faire que d’une manière convenable à la nature de chaque ſujet. D’où il réſulte que le Droit des Gens Naturel eſt une Science particuliére, laquelle conſiſte dans une application juſte & raiſonnée de la Loi Naturelle aux affaires & à la conduite des Nations ou des Souverains. Tous ces Traités, dans lesquels le Droit des Gens ſe trouve mêlé & confondu avec le Droit Naturel ordinaire, ſont donc inſuffiſans pour donner une idée diſtincte, une ſolide connoiſſance de la Loi ſacrée des Nations.

Les Romains ont ſouvent confondu le Droit des Gens avec le Droit de la Nature, appellant Droit des Gens ( Jus Gentium) le Droit Naturel, entant qu’il eſt reconnu & adopté généralement par toutes les Nations policées (Neque vero hoc ſohim naturâ, id eſt, jure Gentium &c. Cicer. de Offic. Lib. III, c. 5.). On connoît les Définitions que l’Empereur Justinien donne du Droit Naturel, du Droit des Gens, & du Droit Civil. Le Droit Naturel, dit-il, eſt celui que la Nature enſeigne à tous les Animaux (''Jus naturale eſt, quod natura omnia animalia docuit, Instit. Lib, I. Tit. II.) : définiſſant ainſi le Droit de la Nature dans le ſens le plus étendu, & non le Droit Naturel particulier à l’homme, & qui découle de ſa nature raiſonnable, auſſi bien que de ſa nature animale. Le Droit Civil, dit enſuite l’Empereur, eſt celui que chaque peuple s’établit à ſoi meme, & qui eſt propre à chaque État ou Société Civile. Et ce Droit, que la raiſon naturelle a établi parmi tous les hommes, egalement obſervé

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