Page:Vasari - Vies des peintres - t9 t10, 1842.djvu/76

Cette page a été validée par deux contributeurs.

des maîtres distingués qui vivaient honorablement. Leurs chefs étaient Jacone, l’orfévre Piloto et le menuisier Tasso ; mais le pire de la bande était Jacone, qui, entre autres bonnes qualités, avait celle de mordre sur tout : aussi n’est-il pas étonnant que cette confrérie ait donné lieu à de grands malheurs, comme nous le dirons ailleurs, et que Piloto ait été tué par un jeune homme à cause de sa mauvaise langue. La plupart de ses dignes, associés étaient continuellement à jouer au palet le long des murs ou à boire dans les tavernes.

Un jour, Giorgio Vasari, en revenant à cheval de Monte-Oliveto, où il était allé rendre visite au révérend et très-vertueux abbé don Miniato Pitti, trouva Jacone, avec une partie de sa troupe, au coin du palais des Médicis. Jacone, ainsi que je l’ai appris plus tard, voulant arriver à lâcher quelques plaisanteries injurieuses à Giorgio, lui dit en goguenardant : « Ohé, Giorgio, comment va votre seigneurie ? — Très-bien, Jacone mio, répondit Vasari ; autrefois j’étais pauvre comme vous tous, et maintenant je suis riche de trois mille écus, ou plus ; autrefois vous faisiez peu de cas de moi, « maintenant les religieux et les prêtres me tiennent pour un vaillant homme ; autrefois j’étais à votre service, maintenant j’ai là un valet qui me sert et qui soigne mon cheval ; autrefois j’étais couvert de ces méchants habits que l’on voit sur le dos des pauvres peintres, maintenant je suis vêtu de velours ; autrefois j’allais à pied, et maintenant je vais à cheval ; ainsi, Jacone mio, ma sei-