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monte, de peindre en clair-obscur une maison que ce gentilhomme avait construite en face de Santa-Trinità, à l’entrée du borgo Sant’-Apostolo. Jacone y représenta des sujets tirés de l’histoire d’Alexandre le Grand, où l’on admire une telle élégance, une telle correction de formes, que beaucoup de personnes pensent qu’Andrea del Sarto en a fourni les dessins. À dire vrai, Jacone se comporta dans cet ouvrage de manière à inspirer les plus hautes espérances ; mais il aimait mieux se donner du bon temps et godailler avec ses amis qu’étudier et travailler. Aussi son talent, loin de s’accroître, alla-t-il toujours en diminuant.

Il faisait partie d’une compagnie dont les membres, sous prétexte de vivre en philosophes, vivaient comme des porcs. Ils ne se lavaient jamais ni les mains, ni le visage, ni la tête, ni la barbe ; ils ne souffraient point qu’on balayât leur maison, ni qu’on accommodât leur lit plus d’une fois tous les deux mois ; lorsqu’ils mangeaient, ils se servaient de leurs cartons en guise de table, et ils ne buvaient qu’à même la bouteille. Cette vie sans souci leur paraissait la plus belle chose du monde ; mais si le corps est ordinairement le miroir de l’âme, je crains bien que leur âme ne fût aussi sale que leur corps.

L’an 1525, à l’occasion de la fête de San-Felice (c’est-à-dire de la représentation de l’Annonciation de la Vierge) célébrée par la confrérie dell’Orciuolo, Jacone éleva, avec l’aide de l’habile menuisier Piero da Sesto, un superbe arc de triomphe isolé, et orné