Page:Vasari - Vies des peintres - t9 t10, 1842.djvu/639

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

prièrent de me charger de ce travail. J’y consentis volontiers ; mais je stipulai que je serais libre de traiter à ma fantaisie un sujet emprunté à la vie de saint Sigismond, par allusion au nom du testateur. Les choses étant ainsi arretées, je me rappelai avoir entendu dire que Filippo Brunelleschi, architecte deSan-Lorenzo, avait donné avec intention, à toutes les chapelles de cette église, une forme propre à recevoir une vaste composition. Poussé par l’amour de la gloire, et sans songer au mince salaire qui m’était alloué, je résolus de suivre le plan de Brunelleschi dans la chapelle confiée à mon pinceau. En conséquence, je représentai, dans un espace de dix brasses de largeur sur treize de hauteur, le Martyre du roi Sigismond, de sa femme et de ses deux fils. Je me servis de l’hémicycle de la chapelle pour figurer une porte rustique, à travers laquelle on aperçoit une cour carrée, entourée de galeries soutenues par des pilastres et des colonnes doriques. Au milieu de la cour est un puits octogone, environné de degrés, et dans lequel des bourreaux s’apprêtent à jeter les deux fils du roi. Les galeries sont garnies d’une multitude de spectateurs. Des valets entraînent la reine vers le puits pour l’y précipiter ; tandis que des soldats sont occupés à garrotter saint Sigismond, dont le visage exprime la résignation et le courage à la vue de quatre anges qui planent dans les airs, et lui montrent les palmes du martyre. Du haut des galeries, l’impie tyran qui a ordonné le supplice de saint Sigismond contemple d’un œil féroce cet horrible spectacle. Je