répondis que je n’étais point en retard, comme il lui serait facile de s’en convaincre. Peu de temps après, le duc vint lui-même examiner en secret mes travaux, et reconnut que les accusations dirigées contre moi étaient le fruit de l’envie et de la malignité. Enfin, à l’époque voulue, ma tâche se trouva terminée à la satisfaction du duc et du public ; tandis que mes ennemis, qui s’étaient plus occupés de moi que d’eux-mêmes, restaient honteusement en arrière. Le duc ajouta aux quatre cents ecus qui m’avaient été assignés pour traitement, trois cents écus, qu’il préleva sur le salaire de ceux qui n’avaient point achevé leurs ouvrages au temps fixé par leur contrat. Avec cet argent, je mariai une de mes sœurs, et j’en fis entrer une autre dans le couvent des Murate d’Arezzo, auquel je donnai, en sus de la dot, une Annonciation et un tabernacle, que l’on plaça dans le chœur où se célèbrent les offices.
Je peignis ensuite une Déposition de croix pour le maître-autel de la confrérie du Corpus Domini d’Arezzo ; puis je commençai le tableau de l’église de la confrérie de San-Rocco, de Florence.
Pendant que je tâchais d’acquérir de la gloire et delà fortune sous la protection du duc Alexandre, ce pauvre seigneur fut cruellement assassiné, et toutes les espérances que j’avais fondées sur la faveur qu’il m’accordait furent anéanties. Ainsi je perdis en peu d’années le pape Clément VII, Hippolyte et Alexandre de Médicis. Bien qu’il m’eût été facile d’entrer au service de Cosme de Médicis,