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tre, à savoir que les maîtres des beaux siècles puisaient essentiellement leur force dans leur union, et qu’ils ne peuvent être compris qu’à la condition de n’être point séparés de leur entourage. En effet, l’œuvre de ces temps est bien plutôt collective qu’individuelle.

Tant que le Pontormo travaille avec Andrea del Sarto, avec Piero di Cosimo, avec Michel-Ange, ses toiles se colorent du reflet des chefs-d’œuvre qui s’exécutent autour de lui. Il est enfant de la grande famille florentine, et non un plagiaire, car Andrea le jalouse ; sa manière n’est ni exclusive ni aveugle, car la voix publique le force à venir prêter le charme de sa couleur à son seigneur et maître, au grand Michel-Ange. Il est une des mille formes qu’a revêtues la pensée florentine, tantôt élégante, tantôt grandiose, toujours sévère. Ainsi, tant que le Pontormo appartient corps et âme à l'école florentine, tant que les œuvres consciencieuses qu’il ne livre à la publicité qu’avec peine, et qu’il exécute cependant avec célérité, peuvent être attribuées séparément à chacun des maîtres qui l’entourent, c’est alors qu’il est vraiment fort, vraiment original. Rameau puissant de l’arbre florentin, il se développe comme ses frères dans son sens intime, et néanmoins, il conserve la physionomie frappante de la famille ; bien différent de l’artiste moderne qui va demander ses inspirations à la solitude, et s’efforce de s’enfermer dans un cercle infranchissable, autant pour n’être pas influencé par ceux qui produisent près de lui, que de peur qu’on ne lui