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tance. On prétend qu’il avait l’intention de l’embellir ; mais soit que l’état de sa fortune s’opposât à ce qu’il entreprît de grandes dépenses, soit pour toute autre raison, il en fit une retraite en harmonie avec son caractère fantasque et sauvage, plutôt qu’une habitation commode et convenable. On ne pouvait pénétrer dans sa chambre qu’au moyen d’un escalier en bois qu’il tirait à lui, à l’aide d’une poulie, lorsqu’il y était entré.

Il travaillait seulement pour les personnes qui lui plaisaient, et quand bon lui semblait. Plusieurs fois des gentilshommes, et entre autres le magnifique Octavien de Médicis, qui lui demandaient des tableaux de sa main, éprouvèrent des refus, tandis qu’il acceptait à vil prix, d’un homme de basse condition, toute espèce de travail. Ainsi, il fit en payement de quelques constructions une superbe Madone pour le Rossino, son maçon, qui sous un air de bonhomie cachait une grande finesse. Le Rossino lui arracha en outre un admirable portrait du cardinal Jules de Médicis, copié d’après Raphaël, et un beau Crucifiement, qu’il vendit à Messer Octavien de Médicis comme étant du Pontormo ; mais on sait de source certaine qu’il est du Bronzino, qui le peignit entièrement de sa main, pendant son séjour à la Chartreuse avec Jacopo. Les trois tableaux que le Rossino eut l’adresse d’obtenir de notre artiste appartiennent aujourd’hui à Messer Alexandre de Médicis, fils d’Octavien. Bien que cette manière d’agir du Pontormo et que son humeur solitaire soient loin de mériter d’être approuvées, on peut