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effor- de naturaliser en Flandre le goût italien. Ils s’inspirèrent surtout des écoles florentine et romaine où ils espéraient trouver ce qui leur manquait ; mais ils ne réussirent qu’à s’approprier les types extérieurs de leurs modèles. L’idéal auquel ils s’élevèrent resta toujours un idéal purement de forme, sans importance et sans vie intérieure.

À la fin du XVIe siècle, une immense révolution s’opéra dans la peinture flamande. Après avoir affecté avec le secours du goût italien les apparences d’un art religieux, elle se modela sur les mœurs du pays. Aux riches bourgeois de Flandre, endurcis par l’industrialisme et blasés par les voluptés, il fallait de la débauche en grand. Pour les émouvoir, il fallait leur jeter devant les yeux des drames effroyables avec du sang ruisselant et des chairs palpitantes : pour les égayer, il fallait leur montrer de ces sauvages kermesses, où mâles et femelles lampent le vin et la bière, fument, ripaillent, sautent, roulent et tourbillonnent avec une frénétique ardeur. Alors surgit Pierre Paul Rubens qui, par la multiplicité et la hardiesse de ses conceptions, par la pompe et l’ampleur de son exécution et le faste de son ardent coloris, sut satisfaire à toutes les exigences de son temps. À sa suite marchèrent van Dyck, Jacques Jordaens, Abraham Diepenbeke, van Thulden, Guerard Seghers, Gaspard de Crayer.

Vers la même époque, Rembrandt intronisait définitivement en Hollande le réalisme de l’art, et tirait des ténèbres la personnalité humaine pour la couronner d’une mystérieuse auréole. Une multitude