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donc d’imiter Albert Durer, et il y réussit de telle sorte, que sa première manière, qui était pleine de naturel, de suavité et de grâce, disparut presque entièrement dans le style tudesque qu’il adopta. À l’entrée du cloître, il représenta le Christ dans le jardin des Oliviers éclairé par la lune. Tandis que Jésus est en prière, saint Pierre, saint Jacques et saint Jean dorment d’un profond sommeil. Non loin d’eux, on aperçoit le traître Judas qui s’avance avec une troupe de Juifs. Tous ces personnages sont si étranges, si bizarres, que l’on ne peut s’empêcher d’avoir compassion de la simplicité du Pontormo, qui dépensa tant de patience et de peines pour s’approprier un style que tout le monde évite, et pour abandonner une manière qui plaisait universellement. Il ignorait donc que les Allemands et les Flamands viennent en Italie pour apprendre cette manière qu’il s’efforçait d’oublier ? À côté de la Prière dans le jardin des Oliviers, il peignit le Christ devant Pilate. Les traits du Sauveur respirent l’humilité de l’innocence persécutée par les méchants. La femme de Pilate plaide auprès de son mari la cause du Christ, qu’elle contemple avec un air qui exprime la pitié, et en même temps cette crainte qu’éprouvent ceux qui redoutent la justice divine. Autour de Pilate sont des soldats dont les physionomies et les costumes ont un caractère allemand si prononcé, qu’on les croirait peints par un ultramontain. Sur le dernier plan, on voit un serviteur de Pilate qui lui apporte un bassin et de l’eau pour qu’il se lave les mains. Cette figure est très-belle, et