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était assez pauvre. Dès qu’Andrea di Cosimo eut doré les armoiries, Jacopo se mit à l’œuvre ; soutenu par une ferme volonté, aidé par la nature qui l’avait doué d’un génie aussi gracieux que fertile, et stimulé par le désir d’acquérir de la gloire, il s’acquitta de sa tâche avec une célérité incroyable et une perfection que n’aurait point surpassée un maître vieilli sous le harnais. Néanmoins, dans l’espoir de faire mieux encore, il avait résolu, sans rien dire à personne, de jeter à terre ce travail et de le recommencer d’après un dessin qu’il avait en tête. Les Servîtes, voyant que les figures étaient terminées et que Jacopo ne reparaissait plus, déterminèrent Andrea di Cosimo à les découvrir. Andrea alla d’abord chercher Jacopo pour lui demander s’il voulait y retoucher ; mais, ne l’ayant pas trouvé, parce que, tout entier à son nouveau dessin, notre artiste n’ouvrait sa porte à personne, il enleva sans plus de retard l’échafaud et les cloisons qui cachaient la fresque. Le même soir Jacopo sortit et se dirigea vers le couvent des Servites pour détruire son ouvrage ; dès qu’il s’aperçut que les échafauds avaient disparu, il courut furieux chez Andrea, lui adressa les plus vifs reproches et lui expliqua le projet qu’il nourrissait. Andréa lui répondit en riant : « Tu as tort de te plaindre, tes figures sont telles que tu ne saurais les faire mieux ; et comme les commandes ne te manqueront pas, garde ton dernier dessin pour une autre occasion. » En effet, les têtes des deux principaux personnages de cette fresque sont si ravissantes, les enfants qui les entou-