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homme, qui cependant était son parent, loin de l’aider de sa bourse et de ses conseils, n’eut pour lui que des paroles dures et méprisantes. Néanmoins, le pauvre enfant ne perdit point courage et passa plusieurs mois à Rome, où, pour se sustenter, il n’eut d’autres ressources que de broyer des couleurs dans les ateliers. Le modique salaire qu’il retirait de son travail lui permettait parfois de consacrer quelque temps à l’étude du dessin.

Taddeo entra ensuite chez un certain Giovampiero de Calabre, mais il n’eut guère à s’en louer. En effet, Giovampiero et sa femme, exécrable mégère, le forçaient de broyer des couleurs jour et nuit, et pour combler la mesure le tenaient à une diète sévère. Ils mettaient le pain dans un panier suspendu au plafond et garni de sonnettes, afin que le malheureux affamé ne pût y toucher sans être immédiatement dénoncé. Taddeo aurait encore supporté son sort avec résignation, s’il eût eu la liberté de copier quelques dessins de Raphaël, que possédait son détestable maître. Enfin il se sépara de lui et résolut de vivre seul.

Il employa alors une partie de la semaine à gagner sa subsistance, et l’autre partie à dessiner, surtout d’après les ouvrages de Raphaël, qui étaient dans le palais d’Agostino Chigi et ailleurs. Souvent il n’eut, durant la nuit, pour tout abri que les loges du palais d’Agostino ou les portiques de quelque édifice public. Les souffrances de tout genre qu’il endura altérèrent sa santé, et l’auraient certainement tué, s’il n’eut été soutenu par la jeunesse.