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de toutes les difficultés et son mépris des méthodes faciles et simples en sont les réelles causes. Si nous ne nous trompons pas à l’égard du Franco, il est bon d’insister sur le grave enseignement que sa légende nous donne aujourd’hui qu’à l’instigation de maîtres certes bien insuffisants, bien pauvrement armés, bien mollement exercés en comparaison des travailleurs forts, dispos, aguerris, d’autrefois, on voit notre jeunesse se laisser déborder par l’esprit de système et la manie de l’exagération ; aujourd’hui que les plus maigres natures, étiolées par la plus débilitante éducation, croient follement s’élargir et se raviver dans les fièvres de l’orgueil et de l’entêtement ; aujourd’hui qu’incapables de porter le présent, on se remue follement sans naïveté, sans conviction, pour refaire inutilement tout un passé qu’on comprend mal puisqu’on veut le refaire, ou pour construire un avenir qui ne peut se révéler. Sur un terrain meilleur, le Vénitien Franco, plus vigoureusement taillé qu’aucun de nous, a été brisé par l’ orgueil, parce que l’orgueil vient à bout des plus fortes organisations et les terrasse plus sûrement peut-être dans les arts qu’ailleurs ; parce que dans l’orgueil ie bon sens se perd, et que le bon sens, proche voisin du sens commun, du sens vulgaire, est la seule base sur laquelle puisse se tenir sans ployer l’artiste le plus grand, incessamment sollicité à sa ruine et à sa confusion par les tendances extrêmes de ses facultés les plus rares.

Suivons pas à pas le Franco dans sa vie tout entière, dominée sinon par la plus saine intelligence