Page:Vasari - Vies des peintres - t7 t8, 1841.djvu/812

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

gravures qui en ont été faites, on sera surpris de ce qu’un aussi beau génie ait tant produit pour rester aussi peu connu.

Jusque dans les compositions les moins importantes, jusque dans les fragments les plus mutilés de l’œuvre de Battista Franco, on trouve cet aspect large et grandiose, et ce caractère de sobriété et d’ampleur, qui suffit pour révéler les plus grands maîtres. Michel-Ange, dans sa mâle et savante délinéation, ne surpasse peut-être pas le Franco, auquel il est sans contredit inférieur, pour ce qui tient plus exclusivement à l’entente pittoresque des distributions générales et de la combinaison des groupes. Imposant et monumental autant que les maîtres les plus austères de Florence, le Vénitien Franco se laisse moins limiter par la stricte symétrie et la processionnelle ordonnance qui ne sont pas, il faut le reconnaître, sans introduire quelque pauvreté et quelque monotonie dans les conceptions les plus vastes et les mieux inspirées de l’école toscane.

On voit par ce peu de mots, par ce rapprochement et par cette distinction sommaire, comment nous sommes amenés à soutenir, ainsi qu’on le faisait dans son temps, le Franco à côté des Florentins les plus renommés.

Cependant, n’est-il pas hors de doute que le nom de cet habile homme ne figure que bien rarement sur la liste des sommités de l’art italien, et parmi ces noms que chacun sait, pour ainsi dire, malgré soi ? C’est que le mérite de Battista est d’une constatation plus difficile aujourd’hui; l’évidence n’est pas