qui mourut jeune, et qui en toutes choses eut la main heureuse, couronnait sa vie d’ouvrier par l’administration intelligente et prospère de sa patrie, de cette petite république d’Arezzo qui n’est pas sans éclat et sans hommes glorieux, et dont il fut le gonfalonier suprême. On pouvait croire un tel homme un grand homme ; il l’était en effet, il le devait sentir. Ses contemporains et lui-même en ce genre se connaissaient aussi bien que nous. Pourquoi donc si peu d’attention et de bruit maintenant pour ses œuvres ? C’est que ses œuvres étaient de leur nature transitoires ; qu’elles étaient faites, sans que personne autrefois s’en doutât plus que lui, pour les besoins et les amours passagers des générations égoïstes qui ne travaillaient plus que pour elles ; pour des générations qui, au milieu du remuement fébrile qui les inspirait, ne discernaient plus combien peu elles respectaient les engagements sacrés du passé et les délicates promesses de l’avenir ?
Dans ces époques, Dieu, sans doute, envoie encore
de grands hommes, mais il leur retire la grâce.
Leur force éclate un moment, mais aussi leur inefficacité
toujours. Qui se préoccupe dans le présent
sans piété pour le passé, dont il tient tout, et sans
amour pour l’avenir qui attend tout de lui, ne peut
durer dans sa renommée, quelque assurée qu’elle
semble à tous. Le Vasari en est un bon témoin.
Mais de ces génies extraordinaires qui se dépensent
follement, faut-il nier l’existence attestée par leurs
contemporains, à cause de leur stérilité constatée par