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On peut donc, à l’époque à laquelle nous avons cru nécessaire de remonter pour embrasser mieux l’ensemble de l’histoire de l’art moderne, signaler deux tendances bien distinctes, deux écoles, si ce mot convient : la première en date, et nous dirons tout à l’heure pourquoi, issue du polythéisme antique et de la donnée homérique ; la seconde découlant du monothéisme patriarcal et de la donnée biblique. Nous allons les suivre rapidement dans leurs doubles productions. Les païens convertis au christianisme furent les premiers à l’œuvre. En effet, voués par leur éducation au culte de la forme, habitués à ce que l’art leur rendît tout sensible, ils durent éprouver le besoin de se représenter la divinité nouvelle plus tôt que ceux qui avaient quitté la religion juive pour suivre celle du Christ, et à qui les dogmes de leur ancien culte interdisaient sévèrement les images. Les païens convertis (ex gentibus) portés à tout idéaliser, représentèrent donc le Christ d’une manière tout à fait conventionnelle, comme un jeune homme d’une beauté parfaite, aux formes molles et suaves, élégantes et féminines, et d’ailleurs imberbe comme leur Apollon et leur Mercure. Les affections voluptueuses du milieu social où ils vivaient se traduisirent dans cette occasion grave avec une telle complaisance et une telle obstination, qu’après bien des clameurs, les chrétiens d’origine juive (ex circoncisione) leur opposèrent un type contradictoire du Christ. C’est cette image si connue, au visage allongé, aux joues amaigries, à l’expression grave et mélancolique, à la barbe