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mirable chose  (3). Pour Gio. Bandini, il fit un tableau qui fut, je crois, envoyé en France, et dans lequel il avait représenté Moïse tuant l’Egyptien. Un Jacob à la fontaine, que lui commanda Gio. Cavalcanti, passa en Angleterre.

Le Rosso habitait alors le faubourg de’ Tintori, dont les maisons donnent sur les jardins des frères de Santa-Croce. Il avait un gros singe d’une intelligence merveilleuse, qu’il aimait beaucoup. Cet animal obéissait surtout à un jeune élève, nommé Battistino, qu’il avait pris en amitié. Au bas des fenêtres de l’atelier, qui donnaient sur le jardin des frères, se trouvait une treille chargée de superbes raisins ; et nos espiègles, au moyen d’une corde, descendaient le singe, qu’ils remontaient ensuite lorsqu’il avait fait sa provision. Le gardien ne tarda pas à s’apercevoir que sa treille se dégarnissait. Attribuant ces ravages aux rats, il se mit en embuscade. Lorsqu’il vit descendre le singe du Rosso, il ne put contenir sa fureur, prit une perche à deux mains et courut sur lui pour le bâtonner. Le singe, sentant que s’il remontait ou s’il restait en place il tomberait sous une main vengeresse, commença en sautillant à détruire la treille, et lorsque le gardien leva sa gaule, notre magot travailla si bien qu’il tomba avec la treille sur le dos du pauvre frère, qui se mit à crier au secours de toute la force de ses poumons. Pendant ce temps, Battistino et ses amis jetèrent la corde au singe, qui rentra sain et sauf à l’atelier. Le gardien, étant parvenu à se débarrasser de la treille, s’en alla, outré de colère, se plaindre mé-