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Tandis que le Vinci travaillait au tombeau de Messer Baldassare, sans se douter que le sien se préparait, le duc envoya Luca Martini à Gênes, avec une mission importante. Luca Martini emmena avec lui le Vinci, tant pour jouir de sa compagnie, que pour lui procurer un agréable délassement en lui faisant voir Gênes. Dans cette ville, notre artiste profita du temps que Luca Martini consacrait à ses affaires, pour exécuter le modèle d’un saint Jean-Baptiste que lui avait demandé Messer Adamo Centurioni. Par malheur, bientôt la fièvre s’empara de lui, et le départ de son ami vint redoubler son mal, peut-être afin que la prophétie de l’astrologue s’accomplît. En effet, Luca Martini fut forcé d’aller trouver le duc à Florence, et d’abandonner, à son grand regret, le pauvre malade qu’il confia aux soins de l’abbé Nero, en le lui recommandant chaudement. Mais le Vinci, sentant empirer chaque jour son état, résolut de quitter Gênes où il était resté bien à contre-cœur. Avec l’aide de Tiberio Cavalieri, qui était accouru de Pise tout exprès, il se fit conduire par eau à Livourne, et en litière de Livourne à Pise. Il arriva dans cette dernière ville le soir, à vingt-deux heures. Les douleurs causées par les fatigues du voyage l’empèchèrent de goûter un seul instant de repos pendant toute la nuit. Le matin, au point du jour, il rendit son âme à Dieu. Il n’avait pas encore vingt-trois ans. Sa mort affligea profondément Luca Martini et tous ceux qui s’attendaient à voir sortir de ses mains quelques-uns de ces chefs d’œuvre que l’on rencontre trop rarement.