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le compagnonnage du Titien, arrive malencontreusement. Discuter, ici, serait puéril. Cependant sur ce point d’achoppement, où viennent se heurter d’éternelles, d’insolubles questions, qui ne sont telles que parce quelles sont mal posées, nous faisons franchement défaut, nous bornant à exprimer, après l’hommage sincère et religieux que nous avons rendu à l’école romaine et à l’école florentine, notre opinion bien nette et bien intime sur la méthode et la personnalité du Giorgione. Cette méthode ne le cède à aucune autre. Forte, ample, simple et gracieuse, elle ne peut vicier ni amoindrir aucun génie. Et le jeune homme de Castel-Franco, qui, malgré ses regrettables dissipations, malgré sa mort prématurée, en résuma le premier les données complètes, et en fournit les premiers et entiers exemples, ne pâlit devant nul autre. On lui prête trop volontiers, sur ce qu’il a fait et sur ce qu’il a pu, tout ce que ses mœurs, les circonstances et la peste lui ont disputé.

Et pour Jean d’Udine, remarquons, en finissant, qu’en dépit de tout ce que peut avoir d’entraînant le bruit des réputations rivales et lointaines, on n’abandonne point l’atelier d’un tel maître à moins qu’on ne s’y désespère ou qu’il ne vous en chasse. Quand le Giorgione mourut, en 1511, à trente-quatre ans, Jean d’Udine n’en avait que dix-sept. Il n’est pas à croire qu’il soit venu, avant ce triste événement, demander à Raphaël de meilleurs enseignements. Raphaël, d’ailleurs, était trop grand et trop intelligent pour dénigrer, tout en l’accroissant et